La Boîte à Rêves
La Boîte à Rêves
Boîte à rêves
Cage à Fleurs,
120x120- huile s/toile - Cage à Fleurs n°14 - 16 mars 2008 -
Dans la ligne de mes pérégrinations autour de l’origine de la peinture, dont quelques réflexions ou commentaires ont été faits ici sur ce blog notamment au propos de l’art paléolithique, je vous recommande la lecture de « la Nuit Sexuelle « que vient de publier Pascal QUIGNART en octobre 2007 aux éditions Flammarion.
Sans son autorisation mais pensant qu’il ne me la refuserait pas , je reproduis ici la présentation qu’il fait de son ouvrage :
'Quand on sonde le fond de son coeur dans le silence de la nuit on a honte de l'indigence des images que nous nous sommes formées sur la joie. Je n'étais pas là la nuit où j'ai été conçu. Une image manque dans l'âme. On appelle cette image qui manque 'l' origine'. Nous cherchons cette image inexistante derrière tout ce qu'on voit. Je cherche à faire un pas de plus vers la source de l'effroi que les hommes ressentent quand ils songent à ce qu'ils furent avant que leur corps projette une ombre dans ce monde. Si derrière la fascination, il y a l'image qui manque, derrière l'image qui manque, il y a encore quelque chose : la nuit'.
Dans d’autres commentaires que QUIGNART a faits ( entretien sur France-Culture le 17 mars 2008 ), je l’ai entendu reprendre l’une des réflexions de l’ethnologue et préhistorien André LEROI-GOURHAN dont j’ai déjà parlé ici, « pourquoi les premières images sont-elles apparues et ont-elles été confinées dans des lieux obscurs où la lumière n’arrivait pas ? «
Et de comparer l’apparition de l’art pariétal à ces images que crée le rêve dans le cerveau c’est-à-dire en quelque sorte sur les parois intérieures de la boîte cranienne…
Le crâne, « cette boîte à rêves « …
Sur cette question de la naissance de l’image dans des lieux privés de lumière ( le fond des cavernes ), des livres entiers ont été écrits, de nombreuses thèses s’opposent…mais je voudrais simplement faire ici un commentaire de l’ordre du bon sens, et qui, une fois fait le tour des hypothèses en présence, semble ttoujours présenter quelque pertinence : d’une part rien ne dit, absolument rien, que les peintures les plus anciennes découvertes effectivement dans des parties de grotte où n’arrivent pas la lumière, et qui remontent grosso modo à -35.000 ans, sont effectivement les dessins ou peintures les plus anciens, et donc les premiers de l’humanité , et d’autre part, ces peintures considérées comme les premières de la main de l’homme ont été découverte dans des grottes dans lesquelles les conditions de conservation étaient optimales : degré d’humidité, absence de lumière, absence de circulation d’air ( car toutes ces grottes en effet présentent cette particularité de s’avérer hermétiques ) et , à l’exception de quelques-unes qui ont été visitées par l’homme au fil des millénaires, absence de présence humaine ( certaines grottes, voire la plupart, se sont effet retrouvées complètement bouchées par un éboulis de rochers et n’ont été découvertes que dans le courant du 19ème ou du 20ème siècle ce qui, soit dit en passant, n’a pas empêché sur ces quelques décennies de visites que soient laissés quantité de graffiti odieux dont certains, malgré de couteux et peu efficaces nettoyages , ont quasiment détruits certaines œuvres ( je pense, par exemple, mais malheureusement il y en a quantité d’autres, au grand bisons isolé de Font-de-Gaume qui se trouve sur paroi gauche après le Rubicon ) –.
Je veux dire que tous les dessins et peintures réalisés par l’homme n’ont pas tous - c’est une évidence , mais est-ce réellement une évidence… ? - été réalisés dans des conditions qui permettaient d’assurer leur conservation : les dessins en plein air par exemple, sur des troncs d’arbre, des pierres, tout ce qui a pu être fait à l’air libre.
On constate par exemple que les peintures du néolithique dans les cavités du levant espagnol , faites sous abri mais en plein air, épargnées pourtant quelque peu par l’ humidité et les intempéries ( pour les abris du Sud levantin, à hauteur d’Almeria comme par exemple Velez Blanco ) , beaucoup plus récentes, sont déjà pour certaines quasiment effacées et illisibles…
Une autre remarque à propos de la question de la lumière dans les sanctuaires profonds, est de reposer la question de la naissance de l’art en tant que confinée, pense-t-on, aux lieux totalement obscurs que sont les entrailles de la terre, les sanctuaires profonds que sont, pense-t-on, les endroits les plus reculés des grottes.
Deux observations : j’ai lu ou entendu que la lumière ( le soleil plus exactement ) rentre dans l’abri du Poisson aux Eyzies en Dordogne, et éclaire le grand saumon qui y est gravé à un moment très précis ( celui d’un solstice ? je ne sais ) , et qui correspond à l’époque où le saumon mâle représenté sur la paroi a les caractéristiques morphologiques reprises dans la gravure ( à la période de fécondation en effet , les saumons changent d’apparence et le mâle appelé bécard présente par exemple une espèce de « bec « bien visible dans la gravure de l’Abri ).
En Cantabria, dans la Cueva paléolithique del Pendo, la très importante frise de 25 mètres de long représentant des biches rouges ( -22.000 à -19.000 ans ) découverte en 1997 alors que la Cueva est fouillée depuis 100 ans, a été dessinée et peinte sur une paroi perpendiculaire au fond de la grotte, à environ 200m de l’entrée , mais celle-ci à l’époque ne présentait pas la même morphologie ; elle n’était pas encombrée par les énormes blocs éboulés entretemps, si bien qu’à certaine époque de l’année et à certaines heures, le soleil entrait au fond de la grotte et éclairait la frise ( certaines biches ont jusqu’à 125cm de longueur ) qui devait alors être visible depuis l’entrée et en tous cas depuis le vestibule qui correspondait à la zone d’habitat.
La Nuit : la fin de la lumière ou son début ?
Le rivage : le début de l’eau ou le début de la terre ?