La Dame de Brassempouy est en chewing-gum

La Dame de Brassempouy est en chewing-gum

La Dame de Brassempouy est en chewing gum

 

A Monsieur le Conservateur du Musée National d’Archéologie de St-Germain- en- Laye.

Monsieur le Conservateur,

Depuis longtemps me hantent la Dame de Brassempouy et quelques-uns des chefs d’oeuvre du paléolithique comme le petit cheval de Lourdes, ou le cheval sautant gravé sur un bois de renne.

Je suis belge, j’ habite l’ardenne ( environ 50 km de Bouillon ).

Il y a peu, au fil de mes lectures, j’ai appris que ces merveilles et d’autres étaient au Musée National d’Archéologie à St-Germain…, que St-Germain n’était qu’à quelques minutes de Paris en RER …et je me suis promis - alors que le temps est toujours tellement compté lorsque je vais à Paris…- d’aller à St-Germain à l’occasion d’un futur séjour à Paris .

L’occasion se présenta ainsi fin novembre : Thalys jusqu’à Paris, RER jusqu’à St-Germain.

Je frémissais en entrant au Château, ticket, couloir, vitrine au 1er et, de loin j’avais reconnu la minuscule Dame que je connaissais déjà par cœur. Je m’approchais d’elle sans la perdre des yeux, j’étais en face, tête- à -tête tellement attendu !

Après quelques secondes, la vision s’assombrit : ce front taillé si net me paraissait un peu fade, l’incision de la coiffure, la ligne du nez me parurent comme émoussés, le visage tout entier semblait éteint. Je ne comprenais pas.

Je lus alors le panneau pour apprendre, indiqué in fine, qu’il s’agissait d’un moulage .

Colère contenue et frustration froide.

Je descends à l’accueil, fais part de ma déception. Non, l’original sera visible un jour ( mais on ne peut me l’assurer ) lorsque sera en état la salle dédiée à la donation dont dépend la Dame.

Je ronge mon frein, tente de digérer ma déception, me raisonne en acceptant l’explication, et me console en pensant aux autres chefs d’œuvre du Musée dont je vais pouvoir profiter .

Retour au 1erétage, le petit cheval de Lourdes est là, et aussi le bison se grattant l’épaule, et le cheval sculpté sur un bois de renne, et d’autres…d’autres…mais eux aussi, stupeur et colère, sont tous des moulages…Je redescends à l’accueil, demande à vous voir, ou à défaut, rencontrer un quelconque responsable. Je voudrais lui dire ma colère ( car mon irritation cette fois a fait place à la colère ), lui dire que l’on ne peut accepter le prétexte de la conservation ou celui des impératifs de la sécurité, que la fonction du Musée est de conserver, certes, mais aussi et en même temps, de montrer, de permettre justement les découvertes que seuls les originaux peuvent donner ; qu’actuellement, au même moment - exemple entre mille - se trouvent à l’Institut du Monde Arabe dans le cadre de l’expo sur les Phéniciens, de précieux petits ivoires sculptés, certes un peu plus jeunes que les bois de renne ou l’ivoire de mammouth concernés ici , mais qui viennent de faire le voyage depuis Beyrouth, et qui sont présentés en original dans des vitrines avec un éclairage ( et sans doute d’autres mesures ) appropriées…que la moindre des choses pour un Musée national, s’il faut vraiment qu’il cache ses trésors, serait d’une part de l’annoncer ( la veille de ma visite encore je consultais le site du musée : aucune mention de ce qu’il s’agit de moulages…et les photos présentés y sont les photos des pièces originales ! ) pour que le visiteur soit prévenu ( jamais, vous le pensez bien, je n’aurais fait le déplacement à St-Germain, et aurait autrement profité de mon temps en restant à Paris ) et d’autre part devrait veiller à la qualités des moulages de remplacement…

Cet état de chose, bien au-delà de ma déception personnelle, est profondément déplorable.

Le Musée manque au respect de ses visiteurs en présentant de mauvais moulages en lieu et place des pièces originales, et en ne prévenant pas le visiteur qu’il ne verra pas les originaux ( une mention sur le site, par exemple, serait indispensable).

Sur place ce jour-là, cependant, -et ce ne fut pas faute d’y avoir insisté - je n’ai pu rencontrer strictement personne : ni le Conservateur ( qu’un quidam ne peut évidemment déranger pour si peu), ni aucune des personnes, collaboratrices ou guides - tous et toutes indisponibles.

Il ne me restait qu’à reprendre le RER, après un tour à la librairie du Musée où , sans doute malignement inspiré que j’étais par les circonstances, je me suis mis à déplorer que, dans son rôle de service public et d’éducation permanente, le Musée n’ait pas indiqué par une note, pour certains livres présentés, que leur contenu ne constituait que des hypothèses dont certaines devenaient dépassées, ou que d’autres par exemple n’avaient plus d’actualité pertinente en raison de découvertes postérieures ( je pense, par exemple, à l’abandon aujourd’hui de la théorie de l’east side story de Coppens ) : je pense en effet que des lecteurs peu avertis ( n’est-ce pas précisément l’un des rôles d’un Musée que d’accueillir aussi un public peu averti ? ) pourraient être induits en erreur en achetant un livre dans cet endroit pensant qu’ils vont trouver là - sur le sujet de la Préhistoire par exemple - des enseignements sûrs et définitifs ?

Faut-il donc que le Musée attende que le public réagisse pour mesurer le problème posé par de mauvais moulages non annoncés et se rende compte que cette situation trompeuse est aux antipodes de sa mission ?

J’avais il y a peu dans mon blog parlé de la Dame de Brassempouy ( en même temps que d’un visage sculpté dans la grotte de Bernifal ) ; j’y insère le présent courrier que je vous envoie. J’y mettrai votre réponse, tant celle-ci peut intéresser un large public.

Je vous prie de croire, Monsieur le Conservateur, en l’assurance de mes sentiments distingués.

 

 

 

 

 

 

 

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