Marie-Madeleine, les hommes et Pontormo

Marie-Madeleine, les hommes et Pontormo

 

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Les hommes, dit-on, aiment les femmes à longs cheveux.

Ou : les hommes aiment que les femmes portent les cheveux longs.

Ou : les hommes préfèrent que les femmes gardent à leur chevelure une certaine longueur.

 

Bien.

 

J’ai trouvé dans la peinture, ou plutôt dans l’histoire de la peinture, et encore : dans la peinture ancienne - à la fois l’illustration et, peut-être l’explication profonde de ce qui serait cette préférence marquée de la part, dit-on, de la majorité des hommes.

 

Marie-Madeleine, femme publique nous dit l’Evangile, avait de magnifiques cheveux longs. Pour le côté magnifique, c’est la peinture qui va s’emparer très tôt du personnage et va lui donner cette chevelure magnifiée par Titien, Véronèse, Bellini, Raphaël et tant d'autres...

 

Les textes de l’Evangile ( seul l’évangéliste Jean, semble-t-il , pas les trois autres : voir Jean VII, 36-50 – vous tapez sur google «  Jean VII, 36-50 «  et vous avez le texte intégral ) rapportent qu’alors que Jésus se trouvait à table ( chez un Pharisien ) Marie-Madeleine s’approcha de lui, s’agenouilla devant lui, lui mouilla les pieds de ses larmes, versa ensuite sur ses pieds un parfum de grand prix, et l’essuya avec ses cheveux.

 

Scène érotique s’il en est, qui provoqua d’ailleurs des remous dans l’assemblée, les plus hypocrites parmi les hommes présents se montrant choqués par cette femme qui gaspillait ainsi un parfum d’un tel prix ( entendez : un parfum de prix moindre aurait fait l’affaire, mais , diable, pourquoi du parfum après tout ? les larmes ne suffisaient donc pas ? )

 

Mais Jésus recadra les choses : il pardonna à cette prostituée repentante tous ses péchés ( de chair, s’entend ) au motif précisa-t-il «  qu’elle avait beaucoup aimé « .

 

Attention : sorti de son contexte, ce bout de phrase peut enflammer les esprits les plus endormis.

Du calme les garçons : Jésus ne veut nullement dire qu’il lui pardonne tous les péchés de son négoce parce qu’elle a beaucoup aimé, beaucoup pouvant en ce cas s’entendre ( allons-y ! ) dans le sens «  a beaucoup dépensé sans compter, pardon si, justement,  son amour pour les hommes «  , ce qui avouez-le, serait d’un singulier fort inattendu -

Non, car il faut replacer la scène dans son contexte , jésus voulant dire au Pharisien qui le recevait à diner, que lui ne l’a pas embrassé lors de son arrivée, alors qu’elle…, que lui ne lui a pas permis de se dépoussiérer les pieds, alors qu’ellle…etc.

Bref, que Marie-Madeleine, toute pécheresse qu’elle est, catin de son état, a témoigné à jésus des marques d’amour que lui le Pharisien qui le recevait pourtant chez lui et en avait plus naturellement l’occasion qu’elle, ne lui avait pas manifestées.

 

Cette femme repentante, belle certainement ( c’est le métier qui veut cela, non ? ), aimante, généreuse aussi sans doute ( je passe sur le cliché de la putain au grand cœur ) , va devenir l’une parmi les disciples de jésus des plus présente  : elle sera au pied de la croix, et sera l’une des deux ou trois témoins e sa résurrection .

 

J’ai été frappé récemment, lors d’un pélérinage à Venise, de constater que Marie-Madeleine est toujours représentée avec des cheveux longs, je veux dire avec les cheveux longs pendant naturellement, frisés ou ondulants, jamais lisses, jamais courts, cheveux au vent du reste, ce qui n’est pas habituel ( je me trompe ? ) pour les représentations féminines dans l’iconographie religieuse ( je parle de personnages féminins de premier plan ) sauf peut-être dans la représentation qu’en fait Van der Weyden, lequel met de l’ordre dans tout cela en encapuchonnant avec soin les méches alarmantes  de Marie-Madeleine dans une coiffe de très bon goût ( je veux dire : austère ).

 

Pourquoi donc Marie Madeleine, cette belle catin repentante, cette imparable séductrice, cette femme qui aux yeux des hommes est à la fois fortement : l’énigme - l’ attrait et le rejet -, pourquoi donc est-elle représentée dans toute la peinture, ou à peu près, avec de longs cheveux ondulés ?

 

Les réponses sont aussi nombreuses qu’évidentes.

 

Et le lien à faire avec le goût des hommes, aujourd’hui encore, puisant là dans le grand inconscient collectif, dans le grand imaginaire bien alimenté par cette iconographie constante, le lien à faire avec le goût qu’ils ont toujours aujourd’hui, malgré les modes, à aimer que la femme porte ses cheveux longs…ce lien, je le fais.

 

Voir Marie-Madeleine en chaque femme.

 

Il y a cependant un hic :

 

 

Combien sont-ils, sommes-nous, à lire ou à avoir retenu les textes de l’Evangile … ?

 

Combien connaissent Marioe-Madeleine , la disciple de Jésus… ?

 

Combien encore s’arrêtent - ou ont l’occasion de s’arrêter – devant Raphaël, Titien et les autres…

 

Je vous mets ici un PONTORMO : retenez bien ce nom, c’est un garçon prometteur…

 

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PONTORMO, la déposition, 1527. Huile sur bois 313 x 192. Eglise Santa Felicita, Florence.

 

Cherchez-y Marie-Madeleine : elle invite le spectateur - rien moins - à entrer dans le tableau dans lequel tout est suspension...

 

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