SENSIBLE

.. Sensible - Sophie CALLE et Pepe ESPALIU , par exemple

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Que l’art émeuve, que sa nature peut-être essentielle est qu’il émeuve et doive émouvoir, est une forme de lieu commun .

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Pas besoin de définir l’émotion.

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L’art aurait ainsi vocation à émouvoir.

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Qu’ensuite les émotions partent dans des directions propres à chacun, est - précisément – l’ affaire de chacun.

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Qu’elles viennent de chemins singuliers est aussi affaire de chacun.

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Certains artistes vont vous émouvoir plus que d ‘autres et vont susciter une qualité d’émotion que d’autres ne susciteront pas :  on peut être plus ému par le visage de la Vierge dans la Pieta de michel-Ange que par le visage d’une Vierge d’Andrea del Sarto mais surtout, la qualité de l’émotion sucsitée par un visage de Van der Weyden ne sera pas comparable à l’émotion produite par la contemplation bousculante d’une pink lady de De Kooning.

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Tout ceci, à nouveau, ressortit à des lieux communs même si l’expérience que peut faire chacun à cet égard est une expérience unique et, à ce titre, digne du plus grand et du plus respectable intérêt ( je me sens subitement pas très malin en disant cela, mais soit ).

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Le propos que je veux avancer ici est différent encore.

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Certains artistes m’émeuvent d’une façon que jusqu’ici j’ai eu du mal à cerner.

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Cette fois, j’y suis.

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Sophie CALLE, et Pepe ESPALIU, sont de ceux-là. Rien d’exceptionnel dans leur réalisation plastique : je veux dire dans la réalisation des objets qu’ils donnent à voir et dont on fait les objets de leurs expositions. Sophie CALLE va exposer de séries de photos avec texte : et chacune des ces photos n’aura aucune prétention artisitique en soi, pas plus que les texte n’ont en eux-mêmes prétention littéraire. Pepe ESPALIU va exposer des béquilles, va montrer une video tournée lors d’une manifestation qu’il organisa à Madrid et où il fut porté de bras en bras, pieds nus, par des milliers de gens formant une chaîne humaine qui se passaient ESPALIU amaigri et comme mourant …

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Ce qui est en scène chez Sophie Calle et chez Espaliu, c’est alors l’émotion elle-même.

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L’émotion comme sujet, et non comme sentiment découlant de l’œuvre .

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Voilà pourquoi des artistes peuvent vous toucher aussi profondément, aussi intensément : non par la qualité de leur production en elle-même mais bien par le fait que ce qu’ils produisent, c’est la mise en œuvre de leurs émotions. Un peu comme si un peintre, au lieu de peindre librement peignait la liberté. Ou encore comme si un peintre, au lieu de peindre avec de la peinture, peignait avec l’émotion comme médium - comme on peindrait avec son sang.

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